L’anguille nourrit son mystère
Parties à l’automne, certaines anguilles se précipiteraient dans l’océan pour arriver fin avril-début mai sur zone et pondre les premières. D’autres prendraient leur temps, passeraient l’été et l’automne en mer et ne se reproduiraient qu’en début d’année suivante.
LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | | Par Nathaniel Herzberg
Eric Feunteun aime à le répéter : « Avec l’anguille, chaque fois qu’on apporte une réponse, on pose dix nouvelles questions. » Cette fois encore, le responsable de la station marine du Muséum national d’histoire naturelle de Dinard (Ille-et-Vilaine) peut user de sa formule. Le programme européen Eeliad publie, en effet, dans Science Advances le résultat d’une campagne de suivi du poisson au cours de sa grande migration à travers l’océan. Il apporte des informations inédites sur le cycle de vie de l’animal… qui épaississent encore un peu le mystère.
Pour mesurer la nouveauté, un retour en arrière s’impose sur le cycle de vie de l’anguille d’Europe. Depuis 1912, on sait que les œufs éclosent dans la mer des Sargasses, une zone de grand calme de l’Atlantique nord, proche des Bermudes. Les larves dérivent puis nagent pendant de longs mois pour atteindre les côtes européennes. Après deux métamorphoses, elles gagnent les rivières du continent, où elles vivent cinq à cinquante ans. Puis, par une nuit de pleine lune, elles dévalent et reprennent la mer. Des milliers de kilomètres sans se nourrir, et les voilà de retour en mer des Sargasses où elles se reproduisent et meurent.
« Diversité de comportements »
En pratique, les choses sont un peu plus mystérieuses. En un siècle, en effet, personne n’a encore vu une anguille adulte en mer des Sargasses. Si bien que les interrogations qui déjà tenaillaient Aristote et Pline l’Ancien, fascinés d’observer des poissons qui semblaient ne jamais se reproduire, demeurent. Sur les 17 espèces existant dans le monde, seule l’anguille japonaise a livré tous ses secrets.
Mais la science a progressé. Le programme Eeliad a ainsi relâché dans cinq zones d’Europe (Scandinavie, mer du Nord, mer d’Irlande, golfe de Gascogne, Méditerranée) 707 poissons équipés de balises capables de fournir la position, la profondeur ou encore la température ambiante (de l’eau) au cours de la journée, et cela pendant plusieurs mois. Soixante-dix pour cent des balises ont été perdues, 18 % n’ont jamais gagné le large. Quant aux 87 dispositifs restants, pas un seul n’a atteint les mythiques Sargasses – seule mer au monde à n’être délimitée par aucune côte.
« Toutes convergent pourtant vers les Açores »
Elles ont pourtant apporté de précieuses informations. Sur le parcours d’abord. On pensait que les anguilles du nord de l’Europe contournaient toutes le Royaume-Uni par l’ouest. Or certains poissons,...
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/10/10/l-anguille-nourrit-son-mystere_5011286_1650684.html#b4trjhTwiei3cpct.99
No comments:
Post a Comment